2023-01.md
Lundi 2 janvier, 19:21
Ok, c'est parti. Je suis sur le canapé dans le salon réaménagé avec willow sur moi qui ronronne et les ronflements de q. en ambiance sonore. J'attends d'être virée et n'arrive à rien d'autre que barboter dans l'angoisse en patientant. J'ai reçu un mail de pôle emploi qui m'invite à un forum et à un match de volley samedi soir. Je doute de tout et me sens nouille, j'ai peur de moi et de mes interactions sociales bancales.
Qu'est-ce que ça changera une fois l'attestation employeur reçue ?
Mais j'ai offert des cadeaux qui ont été appreciés alors ça réhausse un peu le cœur et j'ai fait un peu de vélo tout à l'heure.
Mardi 3, 12:42
J'essaie de lire (The children lost archives, a novel) mais des pensées parasitent ma faible attention, je pense à la petite angoisse dans les grands rayons du Leclerc, qu'il faudra une liste de courses la prochaine fois mais tout de même, une réussite après tant de remises au lendemain. Je pense à ma mère qui demande si je viendrai à un voyage en Allemagne pour le mariage d'une cousine et qui demande si q. m'accompagnera et je ne comprends pas pourquoi elle demande encore, pourquoi viendrait-il ? je pense au coup de fil d'une heure d'il y a quelques jours et à ses insomnies quand elle réfléchit à des trucs que je lui ai dit, à mon couple et je ne comprends pas (de quoi elle se mêle (pas vraiment), qu'est-ce qu'elle en a à faire, sa vie si peu remplie qu'elle fantasme dramatiquement sur la mienne et sur le mauvais objet qu'est mon partenaire selon elle ?) et comment cette espèce de perfidie naïve s'immisce ensuite chez moi.
Mercredi 4 janvier, 22:00
J'essaie de lire The lost children archives après avoir mangé des gnocchis au fromage. J'ai joué avec willow en attendant leur cuisson, je suis contente de ne plus travailler pour passer plus de temps en sa présence. Avant, il y avait une réunion du collectif féministe.
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Il y a moins d'angoisse depuis hier (ou avant hier), les envies ne sont pas plus précises mais au moins elles reviennent --
comme voir Olivia Tapiero en résidence à la Marelle à Marseille ou la programmation de l'Hydre. J'ai envie d'écrire oui, malgré les doutes, et faire écrire -- et recueillir.
23:21 j'ai continué à lire en faisant du stepper car j'ai peur que les postures dans le canapé qui s'étirent dans le temps et le manque de promenades ne réveillent des douleurs de la hernie discale (ça commence un peu, oups) et ça parlait de la beauté de l'enfance alors j'ai pensé aux enfants de G. et j'ai partagé sur Redactlee:
à la dernière manifestation du collectif féministe, une belle manif de nuit aux flambeaux, il y avait une nouvelle arrivée cet été qui est venue avec ses enfants, deux petiots, avec qui j'avais chanté quelques slogans.
quand on s'était revu pour une réu bilan, elle m'avait dit que ça l'avait beaucoup touché que j'intègre ses enfants à la manif de la sorte, et moi j'étais toute aussi émue de ce retour.
et là, on avait une nouvelle réunion et elle a partagé un vocal de ses gamins qui chantent après avoir appris qu'elle allait voir ses copines de la manif "nous sommes fortes, nous sommes fières et radicales et en colère" yeuuuh, apparemment ils font des sortes de mini-spectacles en criant "et la rue elle est à qui, elle est à nous"
> bref vive les enfants
Ça me rassure de sortir de la petite léthargie du mois de décembre, est-ce en partie d'avoir déposer hors de moi les notules ? Quel mystère que l'écriture et son partage. Cela ne m'appartient plus.
3 jours plus tard, samedi 7 janvier, 16:26
> Se retrouver dans un état d'extrême secousse, éclaircie d'irréalité, avec dans un coin de soi-même des morceaux du monde réel.
Je replonge dans L'ombilic des limbes et le pèse nerf d'Artaud, j'ai une pile de bouquins de poésie sur le canapé pour préparer ce que j'ai envie de lire ce soir à la soirée poésie. Je repense à quand je lisais Artaud, à ma rencontre (le texte de sens-critique), etc. et les échos toujours des fols, si évidents et pourtant ténus d'opacité.
Hier au déjeuner avec les gus du SV* dont T., on a reparlé du séminaire de rentrée et ces choses partagées avec le GEM qui tente de se dépasser.
Il me faut écrire pour lier -- comment prendre le temps, trouver la rigueur ; attendre ne semble pas suffir.
Lundi 9, 16:47 dans le train depuis midi, pour encore une heure. J'espère que nextcloud ne va pas être capricieux avec la connexion. Ça va plutôt bien ces jours-ci, on se réveille. J'ai pris mon maillot de bain dans la valise, sait-on jamais le degrés de mon audace face à la mer normande en janvier.
Dans la nuit de samedi à dimanche 15 janvier, 00:11 j'écoute la radio de sknt (DMA 0 DRAM REFRES par MASTER BOOT RECORD) pour recouvrir les ronflements de Q. zopicloné et grippé en lisant All about love de bell hooks, c'est la vie que j'ai choisi (pas vraiment, à peu près, who knows)
Dimanche 15 janvier, 11:52 dans le train j'écoute la micro sieste 71 que j'ai aperçu dans la liste des mp3 disponible dans mes téléchargements et dont je parlais dans une notule d'automne mise en scène sur girl moss récemment.
Est-ce que me pencher sur l'écriture, ce n'est pas la perdre ?
1/17/2023 5:40 PM sur l'ordinateur, je lance un podcast avec Olivia Tapiero, ça commence
> La première chose que je peux vous dire, c'est que la poussière n'est pas un état, c'est une condition.
et je fais pause.
J'ai pleuré cet après-midi, pour mille et une chose - c'est-à-dire pour mon être fragile dans ce monde fracassant et le fil ténu entre les deux qui se désespère parfois de trouver une accroche stable, je m'éparpille toujours, et dans le flou de l'attente, toujours, les choses se déstabilisent. Comment, comment résoudre ce qui empêche de se fixer ; comment résoudre l'épenchement des révoltes sourdes, non muettes, non muselées. Comment arrêter de m'appartenir.
6:25 PM c'était une belle interview, j'aime énormément ce que raconte cette poète holala ! J'en ai profité pour faire un carnet pour mamie : le fond est orange, avec un collage de barres colorées, CARNET écrit en long et blanc, à l'intérieur un collage avec FILATURE NOMADE inscrit, et les pages à petits carreaux, deux de chaques couleursx2, relié avec la ficelle verte.
Jeudi 19, 00:21 je m'endors en lisant
https://sluggish.substack.com/p/what-does-my-anxiety-mean et cette résonance, wahou.
Vendredi 20, 18:04, sur le canapé et Willow sur moi, et deux plaids en sandwich, je lis L'institution renversée - Folie, analyse institutionnelle et champ social, c'est bien, je fais une pause et j'oublie et je repense à l'anxiété décrite par sluggish, et j'ai relu *Salt of the cosmos* avant de l'envoyer à LD qui reparlait de *Oceanic feeling & communism* et cette idée de l'identité floue, et Olivia Tapiero qui écrit qu'elle voit sa poésie se faire ; qui n'accroche pas ; et le psychiatre et sa baie vitrée ensoleillée où je regarde les oiseaux danser dans le ciel, je n'étais jamais venue à cette heure-ci, il dit « vous n'aimez pas beaucoup les usages » et il répète qu'il est paumé.
Je m'observe être - sans prises.
Avec ce livre, je continue l'exploration guattarienne, elle me plaît beaucoup. C'est toujours les libertaires qui m'enchantent le plus. Je ne sais pas où je suis ou comment oeuvrer au déploiement de la pensée, des pensées qui m'apparaissent importantes. :face-in-clouds:
Q. dort. On regarde des films en ce moment : hier, j'ai choisi Celia d'après son affiche avec une enfant des traits indiens maquillés sur le visage, décrite comme une terreur, et d'après le synopsis avec un contexte de crainte du communisme et d'une épidémie à cause de lapins en Australie. C'était chouette, j'ai un peu pleuré à la fin. Ça changeait un peu des films d'horreur de ces derniers jours, assez crispant, en adéquation avec ma petite angoisse qui traîne. Devant l'un d'eux, Relic, je me suis endormie, bercée par l'effroi.
Jeudi 26, 21:01 ; 6 jours plus tard, que le temps passe vite parfois sans écrit.
Une citation de L'institution renversée qui n'ira pas dans mon texte en cours:
> Lapassade ne fait pas que reprendre l'idée, au fond très ancienne, selon laquelle l'inachèvement de l'être humain à la naissance est ce qui motive l'inventivité et la perfectibilité d'un être qui, tout au long de sa vie, doit compenser sa fragilité originelle par tout un ensemble de ripostes et de prothèses culturelles, face à un milieu auquel il reste chroniquement inadapté. Il va bien plus jusqu'à rompre avec une certaine conception de la perfectibilité humaine, qui continue de considérer la maturité comme un but à atteindre, un âge adulte qui serait le *telos* de l'enfance puis de l'adolescence. Si la prématuration et l'inachèvement humain sont le résultat d'un ralentissement évolutif, d'un « freinage », ceux-ci nous rappellent que ce qui caractérise l'humain, c'est précisément cette capacité à retarder, à différer, à conjurer sa capture dans une forme fixe et définitive. A ce titre, un enfant n'est pas plus inachevé que ne l'est une personne âgée : tous deux ont à « entrer dans la vie », c'est-à-dire dans des contextes, des institutions, des milieux, des questions nouvelles, des « bouts de vie » qu'il leur faut accepter ou refuser.
(j'ai souligné)
J'ai écrit dans exlibris tout à l'heure. Demain je vais à Gr., ce matin j'ai finalisé mon départ de l'asso, c'était beaucoup d'émotions qui sont encore retenues quelque part, qui reviendront plus tard (lors de mon pot de départ sans doute dans deux semaines ?).
1/30/2023 3:13 PM
Journée pyjama après le week-end et avant la grève interpro nationale de demain, je lis une interview de Josep Rafanelle i Orra
> Il n’y a pas d’assujettissement sans sujet.
> Cette question du sujet, nous indique une chimère gouvernementale : celle de l’expérience d’un « moi » auto-fondé. Cette conception de l’autonomie ne peut exister en droit que dans un monde dépeuplé des attachements à des entités hétérogènes. « Je suis moi » : en voilà une absurdité ! Que le sujet soit « fêlé », scindé, qu’il émerge d’une structurale séparation d’avec lui-même, dans une incomplétude supposément fondatrice pour s’affirmer contre le chaos de l’indistinction, dans un rapport d’extranéité à soi-même, par la médiation absolutiste du Grand Autre inassignable à un lieu, n’y change rien. Il y a toujours eu dans toute forme de gouvernement la peur panique du chaos supposé d’un avant le Sujet. Ce qui reste est une folle entreprise de maîtrise de soi et des relations aux autres, toujours suspectes, toujours à suspecter. Ce à quoi conduit cette autonomie c’est au ravage de la pluralité de coexistences entre des êtres « autres », qui se situent toujours « quelque part ».
- Entretien republié sur lundi.am
C'est peut-être un peu compliqué pour rien, mais ça rejoint la pensée ritournelle du moment "je n'existe pas".
Mais il faudra reprendre et dépasser l'effleurement de tout ce qui se dit comme
> Dans un monde métropolitain si profondément connecté, si densément articulé malgré sa décomposition, il y a encore de beaux restes du pastoralisme étatique, de ses institutions (les polices productives du monde social : les institutions de lien social, qui font tenir la société comme un ensemble). Je veux dire, il y a la question des institutions qui plane sur nos têtes (les institutions qui prennent soin du foutu lien « social ») et que les révolutionnaires d’aujourd’hui ne voulons pas considérer avec sérieux. Par paresse, par impuissance. Sans considérer cette question sérieusement, nous n’irons nulle part, sauf dans un coin où nous pourrons gémir ensemble, ceux qui avons pris acte du désastre en cours.