débutons une fiche de lecture de la traduction collective de The Undercommons
Les sous-communs : planification fugitive et étude noire [1]
à partir d'extraits choisis

débutons par la préface de Jack Halberstam

L’au-delà en délire, avec et pour les sous-commun*es

> Ça finit dans l’amour, l’échange, la camaraderie. Ça se termine comme ça commence, en mouvement, entre différentes façons d’être et de se lier, sur le chemin de nouvelles économies : donner, prendre, être avec et pour ;

> Ce livre ne prescrira pas de réparation face au déchirement de l'existence.

Le déchirement, le dénuemenent, la dette
le dette parfois est un don
parfois une saisie
toujours capitaliste la dette
une possession jamais honorée
la dette ne peut jamais
être remboursée.

> La dette suppose une relation à une économie basée sur l'exploitation. Pouvons-nous avoir, demande-t-il, une autre idée de ce qui est dû, qui ne suppose pas de lien avec les activités de reconnaissance et de réponse, de paiement et de gratitude ? La dette peut-elle « devenir un principe d’élaboration » ?

> Les sous-commun*es ne viennent pas payer leurs dettes, ni réparer ce qui a été cassé, ni rafistoler ce qui tombe en lambeaux.
> Nous ne pouvons nous satisfaire de la reconnaissance générée par le même système qui certifie a) que rien n’a jamais été cassé b) que nous méritions d’en être la part mutilée

ce n'est pas un espace résiduel
c'est un endroit imprévisible, wild
incontrôlable sauvagerie
une zone permanente déjà là
où s'imbriquent
"la requête, la revendication et l'appel"
dans ce que l'on appelle
dans ce qui nous appelle
the wildness
dans le jazz, l'improvisation, le bruit
la cacophonie des désirs
l'harmonie arbritraire
hors structure

> Ce que veut Fanon, selon Moten, ce n’est pas la fin du colonialisme mais la fin du positionnement à partir duquel le colonialisme fait sens. Alors, pour mettre un terme au colonialisme, il ne s’agit pas de dire la vérité au pouvoir [3], mais d’habiter la folie, l’absurdité et les vociférations du langage de l’autre, cellui que le colonialisme a rendu insignifiant*e.
> Le chemin vers le sauvage est pavé de refus. Si nous commençons Les sous-communs quelque part, nous commençons avec le droit de refuser ce qui nous a été refusé. Moten et Harney, citant Gayatri Spivak, appellent ce refus le « droit premier », un type de refus décisif puisqu’il désigne le refus des choix tels qu’ils sont proposés.

Le refus

> Moten et Harney analysent aussi ce que pourrait signifier refuser ce qu’ils appellent « l’appel à l’ordre ». Et ce que signifierait, en outre, le refus d’appeler les autres à l’ordre, de refuser l’interpellation et le rétablissement de la loi. Quand nous refusons, indiquent Moten et Harney, nous créons de la dissonance et surtout, nous la laissons se perpétuer : lorsque nous entrons dans une classe et que nous refusons d’appeler le groupe à l’ordre, nous permettons à l’étude de se poursuivre, une étude dissonante certes, désorganisée, mais une étude qui précède notre appel et qui continuera après que nous avons quitté la pièce.

> Les sous-communs sont un espace-temps toujours présent.

> Moten et Harney refusent l’orchestration logique du refus en inactivité, absence de projet ou entrave aux décisions politiques sérieuses. Ils nous apprennent à écouter le bruit que nous faisons et à refuser ce qu’on nous propose pour réécrire ce bruit en « musique ».


« La coalition émerge de ta reconnaissance du fait que c’est tout pété pour toi, de la même façon que tu as déjà compris que c’est tout pété pour nous. Je n’ai pas besoin de ton aide. J’ai juste besoin que tu comprennes que cette merde t’achève aussi, bien que plus doucement, tu captes espèce d’enfoiré*e ? »

> La coalition se forme parce que nous reconnaissons que nous devons changer les choses ou mourir. Nous touxtes. Nous devons changer tout ce qui est bousillé et le changement ne peut pas venir sous la forme de ce que nous pensons être « révolutionnaire » – le déferlement masculiniste ou la confrontation armée. La révolution viendra sous une forme que nous ne pouvons pas encore imaginer.
Moten et Harney proposent de nous y préparer
maintenant en entrant dans l’étude.
L’étude comme mode de pensée avec d’autres,
détachée de la pensée exigée par l’institution,
nous prépare à être intégré*es
dans le « avec et pour »
braquer contre

>les rencontres qui fabriquent le monde
ou qui le font voler en éclat
quand tu entres dans ce livre et
que tu apprends comment être avec et pour, en coalition et en route vers
tu ressentiras aussi de la peur, de l’appréhension, de l’inquiétude
et de la désorientation
malencontreuse mais nécessaire,
parce que tu ne te déplaceras plus d’un endroit à un autre,
tu feras partie « du “mouvement des choses” »
cette vie de rien.
Le mouvement des choses peut être touché et ressenti, il existe dans le langage et dans les rêves, il est vol, geste, il est la fugitivité même.

il n’y a pas de répit dans la hess, s’il existe une étude plutôt que la production de savoirs, s’il existe une façon d’être ensemble dans le déchirement, s’il existe des sous-communs, alors nous devons touxtes trouver le chemin qui nous y mène. Et ce ne sera pas là où sont les bêtes sauvages, ce sera un endroit où le refuge n’est plus nécessaire et tu comprendras que tu y étais déjà depuis le début.

Endnotes

[1] Les sous-communs : planification fugitive et étude noire PDF

[3] N. d. T. : en anglais « speaking truth to power » fait référence à une stratégie politique pacifiste, notamment de lutte indépendantiste.